jeudi 30 avril 2015

SSC 6/1 - Kwiti moko ya grave !


La gueule de bois

Evidemment, rien ne s'est passé comme prévu. Rien n'est arrivé de ce qui devait arriver. A force d'attendre, attendre, attendre… mes pralines offensives (fourrées au poil à gratter, au fluide glacial ou à la bile de crocodile, au tangawisi, au pili-pili, à la bave de crapaud ou au jus de limace, à la boule puante ou à la gélignite), empestant la chair en décomposition et censées devoir exploser à la gueule des « méchants » sont devenues toutes molles et se sont désactivées. 
Je n'ai pas pu les distribuer comme prévu. Et mes pralines ridiculisantes, dégoulinantes de vérités bien salissantes et impossibles ensuite à dissimuler, n'ont pas explosé à la gueule des crapuleux et de leurs commanditaires. 
Seule La Malibran, soprano du barreau et diva de la Châtellenie d'Awel, a pu être atteinte. Et ces pralines infamantes et déshonorantes m'ont fondu dans les doigts.

- Bomba Bomba ? 
- Mabe!

J'ai dû alors changer de siècle et de continent. J'ai quitté précipitamment la châtellenie d'Awel et me suis réfugié en catastrophe à Djaba, dans la République d'Awoyo d'où je disposais d'une vue privilégiée sur la République autocratique du Luabango.
Et ma praline est devenue mon roman lui-même : le roman-réalité  comme moyen de combattre le système sorcier, comme arme de lutte contre la crapulerie, le mensonge et la manipulation, l'arbitraire et la barbarie quand tout le reste a échoué.
Mais les différentes séquences de mon buku n'ont jamais pu, ainsi que je l'avais prévu, être distillées goutte à goutte comme prévu, comme une rumeur insidieuse ou un poison lent. Ni être diffusées tous azimuts par vagues successives ou en rafales pétaradantes, dans le but d'obtenir la libération de Mopoie et Bangazegino en couvrant d'opprobre et de ridicule les crapuleux et leurs commanditaires. 
Les séquences de mon roman qui se voulait une « arme de réserve contre la crapulerie » ont fait pschttt. Certaines d'entre elles auraient sans doute pu mettre certaines personnes en danger et je ne pouvais pas prendre le risque de les rendre publiques. J'ai dû me retenir de les diffuser.

- Bomba Bomba ? 
- Mabe!

J'ai été amené ensuite à changer de stratégie et d'écriture. Abandonnant la petite Kimya, à présent guérie, Kangni Alem et Gougoui Kangni. Délaissant, pour un temps, la sauce gluante, liante et adoucissante à base de gombo ou d'adémé dans laquelle j'avais mis mariner ou macérer toutes les séquences de la deuxième série de mon roman. Abandonnant les rêves tapageurs, les élucubrations fanfaresques, les farces grossières et la relation d'événements « personnels » ou « familiaux » censés se dérouler ou se produire un peu partout dans le monde et qui n'intéressaient absolument personne. Délassant pour un temps, mes aventures de hibou à oreilles de chat et m'installant, de plus en plus profondément et de plein pied, en République autocratique du Luabango moins onirique et de moins en moins farceur, de plus en plus incisif et de plus en plus accusateur...

- Bomba Bomba ? 
- Mabe!

J'ai tout tenté. Tout ce je pouvais faire par écrit. Mais rien n'a marché comme prévu. Je n'ai pas pu aider à la libération de Mopoie et de Bangazegino ni démonter le système sorcier dont Mopoie et Bangazegino ont été les victimes et contribuer à son démentèlement. Aucune de mes hypothèses de diffusion ne s'est avérée praticable et j'ai dû les abandonner, les unes après les autres, parce qu'elles risquaient de contrarier ou de compromettre de multiples démarches familiales, politiques, judiciaires ou diplomatiques entamées et poursuivies courageusement, de plusieurs côtés et à différents niveaux pour obtenir la libération "effective" de mes deux personnages principaux
J'ai donc attendu, attendu, attendu le vote, la promulgation et la mise en application de la loi d'amnistie. Pour rien.
J'ai ensuite attendu, attendu, attendu que les noms de Mopoie et de Bangazegino figurent sur une liste de personnes libérables. En vain.

- Bomba Bomba ? 
- Mabe!


Rien ne s'est passé comme prévu.
Et quand, en désespoir de cause, j'ai pris la décision de me jeter dans la gueule des crapuleux pour mieux pouvoir leur crever la panse... De l'intérieur !, voilà que la jambe de mon pantalon s'est prise dans la chaîne de mon vélo de facteur ardennais : des toubibs m'ont interdit de voyager ou me l'ont déconseillé vivement. Et lorsque finalement j'ai pu débarquer dans la ville-province d'Expo (alias Mboki, lokola "Mboka ya ba ndoki"), personne ne m'attendait à l'aéroport. Aucun prélat du Saint-Office, aucun arthropode de l'ex-Service d'action et de Renseignements Militaires ou de l'ex-Agence nationale de Documentation. Les crapuleux ne se sont pas intéressés à moi, ils ont « fait l'indif », m'ont complètement zappé et n'ont même pas ouvert la gueule.
Et pendant tout le temps de mon long séjour dans la ville-province d'Expo, rien ne s'est passé comme prévu. Le Conciliabule central a certes été remanié et la voix de La Malibran dont les dernières prestations, particulièrement lamentables, avaient conduit à une désaffection du public pour l'opéra1, s'est éteinte
- Pour avoir crié trop fort ou s'être efforcée de chanter en dehors de son registre ?
mais le sort de Mopoie et Bangazegino est resté inchangé. De nouveau « mangéristes » ont certes été cooptés par les sorciers en place mais le général*** a été maintenu en fonction et sa capacité de nuisance est demeurée intacte et pourrait même avoir été renforcée. Et Tshaku, le sorcier régalien  chargé de la mobilisation, de la propagande, de l'animation politique et de l'éducation du peuple (et coordinateur stratégique de la pensée unique à l'usage des ensorcelés) et porte-parole du Conciliabule central a été reconduit à son poste en reconnaissance de ses « hauts et innombrables mérites d'homme politique fidèle et aguerri » et continue de s'indigner, de proférer et de stigmatiser.

- Bomba Bomba ? 
- Mabe!

J'ai donc pris la décision de mettre fin à mon roman et de libérer de façon "romanesque" Mopoie et Bangazegino. 
De moi-même. De ma propre initiative. Unilatéralement. Sans consulter personne. Sans demander l'avis des intéressés. Ni celui des familles ou de leurs avocats. Ni celui des crapuleux et de leurs commanditaires
Mais je dois encore, même à présent, me retenir de diffuser en l'état un texte qui ferait la relation des tribulations de Mopoie et Bangazegino, rétablirait la vérité des faits, réhabiliterait les victimes ou saluerait leur libération et mettrait à nu tous les mécanismes du système sorcier en République du Liabango, dénoncerait les crapuleux et démasquerait leurs commanditaires, parce que, même après leur libération… A supposer qu'elle soit effective ! mes personnages ne pourront jamais se sentir définitivement à l'abri des sorciers, des »services » et des crapuleux. Et qu'ils ne seront jamais libres dans une sorcellerie à moins d'entrer eux-mêmes dans le système sorcier.
A moins de détruire ce système !
Et qu'ils ne souhaitent sans doute pas… Et je les comprends ! Courir actuellement le risque de réveiller la bête immonde qui leur a déjà pourri cinq ans de leur existence.

- Bomba Bomba ? 
- Mabe!

A présent, Kimya a de belles petites joues bien rondes et un sourire mutin et devient de plus en plus sympathique. Kangni Alem m'envoie régulièrement des invitations à la rejoindre sur un réseau social... Soki Lindekin, soki Linkedin !, et j'adresse un mail à Gougoui qui,comme d'habitude, n'y répondra pas. 
Tout est bien. Tout finit bien.
Piteusement.
J'ai mis mis un terme à mon roman et je me résous, « fin des fins », à installer « Sorciers, services » et crapuleux » sur internet, dans un blog créé à cet effet. Et à en fourguer différentes séquences à quelques-uns proches. 
Piteusement. 
Avec un an de retard et dans une version autocensurée et soigneusement édulcorée pour qu'on ne puisse pas identifier de façon trop précise les différents protagonistes de mon histoire abracadabrante. 
Piteusement.
Sans autre objectif que de faire savoir à ces quelques-uns proches que même si je suis devenu complètement bimbim (et asocial par la force des choses, ne pouvant plus ni boire et manger avec les gens, ni participer à leurs ébats ou à leur débats), j'aime toujours bien ça, me poiler, sarcasmer, me foutre de la gueule des gens et de la mienne aussi.
Mais, dans son état présent, je crains fort que mon buku-feuilleton n'amuse personne. Pas même pas ma femme mariée et mes fieffés enfants. 

Mon buku n'aura donc probablement servi à rien et ne sera lu par (à peu près) personne. 
Mes projets de roman-réalité ou de roman-action auront fait long feu. 
Et mon tonneau du villageois sera finalement 
- Et ça se termine comme ça, sans même un procès en diffamation ? Sans même que Vié ba Diamba soit attrait en justice pour imputations dommageables ?
- Par qui ? Il aurait fallu que les crapuleux et leurs commanditaires se mouchent ! Ils s'en sont bien gardés !

devenu ce derrière quoi il se cachait : de la lit-té-ra-tu-re.


C'est bien ce que je craignais, le RIIIR n'a jamais libéré personne et la lit-té-ra-tu-re, c'est de la merde. 
J'aurai essayé mais j'ai foiré. 
La lit-té-ra-tu-re, ça ne sert à rien ni à personne. Ne plus RIIIR et ne plus écrire, pourtant, c'est comme arrêter de faire l'amour, on n'y parvient pas tout seul.

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1 La désaffection du public pour l'opéra est principalement le fait de La Malibran (arrogante et imbue de sa personne) et de ses interprétations criardes et grimaçantes. 
Place à présent aux  remueuses de fesses et danseuses de ndombolo porno ! 




Ndlr : Vous êtes perdu(e)s ?
Et vous vous demandez où trouver un plan de la ville, un menu de la semaine ou une table des matières quelconque… et comment avoir accès à chacune des différentes séries de séquences du buku « sorciers, services et crapuleux » ?
Problème ezali te, cliquez sur : http://sosecra.blogspot.be/










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